Stewart & Buffalo

à minuit la maison dégorgeait sa petite foule moite jusque dans les jardins, l’angle de Stewart et Buffalo. je suivais la robe jaune citron de Jennie ; les filles déjà avaient roulé dans les buissons, ou riaient fort, leurs dents luisantes sous le porche à demi-éclairé. j’avançais à petits pas. au premier étage, les tables empilées pour laisser place aux danseurs, leurs yeux qui clignotent comme l’unique et ridicule boule à facettes accrochée au plafond. T a pris un air dégoûté : it looks just like a frat party ! le carrelage de la cuisine collait aux pieds. bière, chips, dips, divers fluides corporels. j’attendais je-ne-sais-quoi dans la cage d’escalier. les filles qui montent avec des robes à paillettes ; des types qui poussent avec les épaules, façon quarterback ; la nuit qui coule aux fenêtres, épaisse et délicate dans l’odeur des grands arbres. Y est partie très vite : I’m too old for this shit. je buvais un breuvage étrange : cranberry juice, fruit punch ?

- everclear a dit Kaelin en me tendant son bras. la maison tremblait, la nuit entière sur la colline penchée. l’après-midi j’avais tant pleuré : cette chose minuscule qu’est la vie, où toute chose se touche un instant et jamais ne se rejoint. on veut le départ : le départ est fiction, fantasme, il s’effiloche dans les doigts comme de rien jusque dans un autre matin sale, une autre solitude. et puis à quoi tient-on ?

la robe lanterne de Jennie, sous des étoiles différentes, quand on rentre dans la nuit et l’invisible rivière gronde, gronde toujours dans les gorges embrumées.

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