la constante

M : la longue traversée de la nuit, on parle peu ou de choses primordiales, les lumières s’effilochent, quelquefois je ne sais plus si c’est le grand bonheur ou le début des larmes. tout va vite : des bidonvilles de Rabat à la rue Rémusat, j’ai dans l’oeil des morceaux de moi-même qui ne se connaissent pas. tu m’entraînes dans les escaliers, l’appartement sent le parquet ciré, les parfums forts et le basilic oriental, D fête son anniversaire et s’imagine que je suis le cadeau. ça n’est pas moi qu’il veut : c’est ce qui est en moi qui t’est le plus dévoué, ce désir dans ma peau dès lors que tu t’approches. ridicules situations d’alcôve : et je regarde partout les mêmes misères se dupliquer, les corps qui se cherchent, veulent l’appui, le surplus, l’absolu d’une marge de plaisir jusqu’alors oubliée, les corps qui se heurtent, se confrontent, ils prennent les mots pour des totems et la friction des chairs pour une promesse de jouissance. je voulais te dire – je ne peux pas le dire – que je ne me sors pas de toi, je n’arrive pas à me sortir de toi, j’ai vidé de ma peau tout l’amour qui me tenait à toi, j’ai tout vidé, il n’y a plus rien, maintenant je peux descendre dans la chair d’autres types et je ne sentirai rien, ni de toi, ni d’eux, ni de personne parce que les corps passent et s’égalent, tu dis que l’amour ne doit pas être premier et c’est vrai, il ne l’est pas, au fond il ne l’a jamais été, c’est toi qui l’es et ça ne s’estompe pas.

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