nuit noire au bord du lac, dans le restaurant où se sont rassemblés les amis de E pour son anniversaire je me fais l’effet d’une complète étrangère et pourtant, si vite les éclats de voix, les fous rires, ça parle de politique et de hockey et jamais de littérature, ce qui pour moi, soudain, est un grand soulagement. E a veillé à ce que je sois assise à côté de lui, il connaît mon immense fragilité et plus encore ce goût du débat qui très vite m’entraîne dans une conversation passionnée avec ses amis: les types me regardent, les yeux ronds, leur expliquer par le menu à quel point il est difficile de dire haut et fort que l’on ne croit pas en Dieu dans leur pays, et à quel point leur éternel politiquement correct va finir par me rendre désagréable. c’est une brochette de types brillants, scientifiques, Ivy League – mais de là à me soutenir que les molécules du corps de Jésus sont jusque dans le pop corn au cheddar que je grignote un peu rageusement, il ne faudrait quand même pas exagérer…
plus tard, dans l’ascenseur, son meilleur ami me dit: you like the attention don’t you? et je lui retourne le compliment, nous entrons dans un très bel appartement du centre, Mouton-Cadet, petits-fours, je ne sais quoi, il fait celui qui ne connaît personne mais tout le monde l’a reconnu, il est l’un des plus jeunes maires du pays, l’un des poulains chéris du parti Démocrate, et ce n’est que le début. touché fait-il, but the difference is, I’m a spoiled brat and you’re not.