l’autre Paris

sortie de mon lit au milieu de l’après-midi avec les yeux brûlants – heures longues, heures violentes, sans raison.

je descends dans la rue à demi-habillée parce que j’ai vu passer H sous mes fenêtres – il revient d’Algérie où il a enterré son père, ses yeux sont marqués mais toujours il pose la main sur le coeur pour me saluer, on parle de tout, de rien, de cette rue où nous nous sommes rencontrés un jour parce que je pleurais à cause d’un garçon, où nous avons parlé parfois des nuits entières assis sur le bord du trottoir pendant que le reste de la bande vidait des canettes de bière, cette rue devenue boutiques bio et sushi qui s’est imprimée sur celle où il a grandi, aimé et fait quelques conneries, il me dit qu’il est reparti vivre dans la cité avec sa mère, que c’est une vie très abrupte (c’est le mot qu’il emploie), sous la pluie fine nous nous promenons, le long de l’eau et du temps il a des amis partout, il convoque pour moi les voies romaines, les barricades communardes, les catacombes, je sais qu’il est d’une grande érudition mais quand je m’émerveille, spontanément, de cette multitude de détails il me dit très doucement: tu sais, 9 ans de prison c’est très long.

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