« Michael Kohlhaas »

déjeuner avec A qui est tout ce que l’on attend du monde, délicat, brillant, et qui écrit admirablement. nous parlons de la force puissante des chevaux dans le film d’Arnaud des Pallières, Michael Kohlhaas, sur lequel il a écrit un beau billet.

je lui dis ma joie devant tant de beauté concentrée, le mouvement de l’ombre des nuages sur le sol, les corps meurtris des chevaux noirs, la splendeur de Mads Mikkelsen, visage émacié, corps sculptural, à tel point que j’en étais parfois prise d’une soudaine fulgurance dans la poitrine, et que je suis sortie du cinéma un peu ivre, chancelante sur les quais. j’allais voir Michael Kohlhaas en espérant d’abord trouver cette lande lunaire que j’aime, l’austérité des villages de pierre des Cévennes, le temps qui change au fil des rafales de vent, à jeter la nuit de l’orage dans les après-midis d’été. du caractère physique, puissant, des corps et des chevaux, je n’attendais pas tant: une caméra crue, de documentariste, qui prend la mesure des volumes, du temps, des silences, filmant la naissance d’un poulain avec une parfaite simplicité, égale au geste de Kohlhaas de s’essuyer les mains sur la paille ou plisser les yeux au soleil, moments détachés de toute ardeur narrative comme encore cette longue courbe opérée par les cavaliers à l’attaque, dont la lenteur épouse d’abord le relief de la montagne.

bien sûr on entendra dire que Michael Kohlhaas est un film sur l’injustice, sur l’intégrité, sur l’excès, et cela est sous doute vrai, et me désintéresse.

j’aime le cinéma qui me donne ce que la vie ne m’accorde que par moments désorganisés: non pas qu’il la supplante ni y supplée, mais qu’il m’offre des images à l’intersection du rêve, de la lumière et du corps, car du cinéma je n’attends jamais des histoires, toujours de la beauté.

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