entière

ce que je préfère dans un dîner ou une soirée c’est quand, saluant les invités, je remarque que figure parmi eux l’archétype du zouave avec qui il est on ne peut plus facile de ne pas être d’accord. c’est à la fois une attaque frontale de ma part et une sorte d’honneur : j’aime les gens qui me donnent l’occasion de la confrontation. la plupart du temps, à Paris, je prends pour proie des garçons – ça fait gagner du temps, et puis il est de notoriété publique que je suis celle qui toujours défendra les filles. ce soir, Jennie m’avait apporté sur un plateau un thésard de Harvard : misogyne en diable, prétentieux à mourir et maniant la langue avec la plus grande aisance – tout le monde l’évitait et moi j’étais ravie. au final – et c’est bien là qu’il s’agit pour moi d’un sport – je le trouvais presque sympathique, après l’avoir ridiculisé.

et puis le très doux W s’est penché sur moi pour murmurer : tu n’as pas besoin de le détruire pour posséder les attributs que tu lui prêtes (oui il l’a dit à peu près comme ça). W est si jeune et ses yeux brillent tellement. à n’importe qui d’autre j’aurais répondu : est-ce qu’on peut arrêter une minute de parler de vos pénis ? mais W avait raison : le goût de la joute, l’amour de la rhétorique ne sont que les jolis détails d’une question autrement plus tragique – toujours je suis comme d’une tribu ancienne où la coutume enjoint de manger le coeur de son ennemi pour gagner sa puissance. ce qu’il faudrait admettre : je n’ai pas besoin de dévorer le coeur d’un Harvard boy pour être brillante ; ou, plus difficilement, il n’est pas nécessaire de découper un garçon en petits morceaux pour être une fille entière.

il y a encore du travail, et du dommage collatéral en perspective…

Cette entrée a été publiée dans journal, avec comme mot(s)-clef(s) , . Vous pouvez la mettre en favoris avec ce permalien.

Les commentaires sont fermés.