lettre à M.A.

lettre à M. A.

c’était une semaine longue de désirs et désastres. j’écoutais Blondie : « Maria », en boucle, pour cette sombre histoire de fille amoureuse de son voisin –  « …She’s oceans running down the drain / Blue as ice and desire… » c’était une semaine longue et s’étirant toujours tout le long du canal… la nuit, M et Jens dans ma cuisine rouge Lacan, à vider des bouteilles sur fond de vieux tangos ; le matin, sur le balcon, grand soleil et menthe fraîche, comme de toujours.

je voulais tant être légère, le soir, dînant avec ses amis, copiant sur des papiers : je n’ai pas besoin de lui - et c’est vrai, il faut que ce soit vrai – « so toxic » disait Britney Spears : il faudrait toujours écouter les saintes vérités du top 50. tous les jours il disait qu’il allait partir, tous les jours il venait rêver sur mon balcon et puis le jour enfin où il n’est pas venu c’est Eriu qui est venue, la belle et rousse Eriu, avec Sara, avec Jihanne, parce qu’elles savaient le gouffre.

c’est fou les filles quand ça se reconnait, c’est merveilleux les formes que ça construit : c’est ainsi que ce jour-là, je crois, elles ont dessiné la grande barrière de corail autour de moi.

je crois que vous aussi vous aimeriez Eriu au prénom de reine d’Eire : plus que fée ou lutin elle est cette longue et jeune fille blanche et rousse à demi-irlandaise à demi-italienne, élevée en Espagne, et si vraie et si douce, le plus beau des coups de foudre depuis tellement d’années. Sara est anglaise : brune, garçonne, désinvolte, elle pose son eyeliner en légers pointillés sous des yeux de fumée. Jihanne est magnifique, méditerranéenne, capricieuse et légère, elle fait une consommation splendide d’Italiens et de gin. elles sont nombreuses encore : Laura, Adeline, Anya, la blonde Shanna aux yeux pervers, Marina qui sait s’énerver comme personne. c’est un monde qu’elles ouvrent et où je me retrouve, j’appartiens, je respire. hier sur le canal, dans la nuit froide, pointue, Eriu tenait ma main et il me semble qu’encore, alors que je vais et viens dans ma tristesse, elle me tient entièrement.

à vous,

O.

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