(Cannes)

comme le train file : la plaine blanchie, arbres gelés, morceaux de fumée sur les maisons et les routes. j’écoute Sarah McLachlan : Full of grace. c’est Avignon bientôt, toute ma vie Avignon sera la plaie heureuse de ce moment peut être où j’ai connu la joie la plus violente, mille aiguilles de pin entrées dans la paume des mains et la force physique des torrents. Avignon passe : les ifs rangés sur le côté de mon coeur, les vignes étales, et la lavande. le train tourne le long de la mer maintenant : c’est l’Esterel noyé dans le midi de bruine, et qui rougeoie quand même. Cannes enfin, cubes de béton sur la mer, I feel just like I’m sinking / And I claw for solid ground…

l’après-midi dans les livres et le sommeil, l’air tiède, les palmiers sous la pluie. une certaine qualité de tristesse – désemparée de moi-même et calme tout à la fois. je vis toujours l’instant comme l’unique : celle que je suis pourtant n’est pas celle de demain, elle craint de lui laisser la place ou le temps, elle a si peur et c’est de surprise, remettant ses chaussures de tango sur un parquet ciré, ou courant dans la rue, qu’elle se rappelle soudain qu’elle est d’abord filante.

ma tête sur son épaule, les yeux clos, ensemble nous bougeons plus vite que les peurs qui m’enserrent. tout s’estompe dans l’allure : les pas, la nuit, le flottement de ma robe à mes jambes, ventilateur grondant qui souffle sur ma nuque et, tout entière dans l’écoute, j’ai pris le scintillement des talons sur le parquet pour la pluie dans les arbres d’une rue de Buenos Aires.

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